le nom de l'entreprise

 

 

Trouvez-vous un nom en or

Finis les «Durand et Cie» ou les «Taxis 75» et autres abbréviations. Le patronyme d'une entreprise est un élément stratégique de communication. Voici quelques pistes pour muscler votre créativité.

Après le financement, trouver un nom juste pour son entreprise reste le sujet de préoccupation majeur de tout créateur. C'est le premier mot qu'on prononce lorsqu'on parle de sa société. Il doit évoquer une histoire et marquer les esprits pour que les clients s'en souviennent. De plus, le patronyme d'une société - comme la marque d'un produit - apporte de la valeur à l'entreprise. «Je vends les prestations de mes consultants plus cher sous l'appellation Mémento Conseil que s'ils travaillaient seuls», affirme Evelyne Platnic-Cohen, dirigeante de cette société de conseil en stratégie clients. L'ère des «Dupont & fils» est donc révolue. D'autant qu'on peut trouver une dénomination originale sans se ruiner. «La recherche peut être effectuée en interne quand il s’agit de petites entreprises», assure Marcel Botton, président de Nomen, un cabinet spécialisé dans la création de noms de marque. C'est ce que font la plupart des gens de façon intuitive.

Voici quelques conseils pour vous aider à cadrer votre réflexion.

 

 

 

Attention aux noms coups de foudre...

Aujourd'hui, la tendance est clairement à l'audace. Une marque dérangeante est mieux perçue qu'une marque trop lisse.

Il n'y a pas trente-six façons de trouver un nom: soit on reprend un terme existant, soit on l'invente. Dans les deux cas, le processus est rapide. L'engouement que le nom suscite chez le dirigeant est le principal critère d'évaluation. Si ce dernier est convaincu, il y a de fortes chances que le titre soit bon. Il va l'incarner, le défendre, le faire vivre.

«J'ai sollicité beaucoup de monde pour trouver l'appellation Mémento Conseil, raconte Evelyne Platnic-Cohen. Au début, rien ne me plaisait. Mais, quand mon mari a lancé "mémento", ç'a été le coup de foudre. Je savais que c'était le bon nom, je l'imaginais déjà imprimé sur mes cartes de visite.» Un spécialiste de la question nuance cette vision purement instinctive: «Certes, un bon nom parle à tout le monde, au premier degré. Mais il doit aussi compter deux ou trois niveaux de compréhension supplémentaires pour celles et ceux qui cherchent à évoquer plusieurs choses à la fois.»

Il n'est pas de bon ton de faire référence à une activité précise. Que deviendrait Vins en ligne si la société décidait de diversifier ses activités? Il faudrait la renommer. «Inutile de décrire son métier sauf si l'activité est nouvelle et pour afficher qu'on est le premier à l'exercer», précise Florence Hussenot, une créatrice qui a notamment trouvé Explorimmo.net pour un site d'annonces immobilières.


La plupart des noms sont déjà pris

La solution: trouver un nom sorti de nulle part ou encore inventer un néologisme en jonglant avec des syllabes.

Les analogies restent une voie intéressante à explorer. Il s'agit d'emprunter un terme à une autre langue ou à n'importe quel champ lexical (celui de la musique, de la nature ou des couleurs, par exemple). Le latin reste «la» valeur sûre. Il fait sérieux et donne du sens car la majorité des langues européennes sont latines. Le mot est compris au-delà de nos frontières. «Je me suis d'abord penchée sur le vocabulaire musical, parce que je voulais insister sur la notion d'harmonie, poursuit Evelyne Platnic-Cohen. J'ai étudié pas moins de deux cents termes avant d'arrêter mon choix sur "arpège". Mais, en France, soixante-dix sociétés portent ce nom, dont dix au moins font du conseil. J'ai laissé tomber. Un peu plus tard, j'ai été séduite par le sens de "mémento". Cela signifie "souviens-toi" en latin. C'est idéal pour un cabinet de formation.»

Question idiote: pourquoi n'avoir pas retenu Platnic Conseil ou Cohen Consultant? «Impensable! répond la jeune femme. Quel imbroglio le jour où je décide de céder mes activités. Il faut tout rebaptiser, on perd sa visibilité ou, pis, on n'a plus le droit d'utiliser son propre nom!»

Il n'existe pas de recette toute faite pour trouver un nom. En revanche, il y a une règle: il faut être inventif. «La tendance est à l'audace, martèle Marcel Botton, chez Nomen. Une marque dérangeante est mieux perçue qu'une marque trop lisse. Les études montrent que les Français reconnaissent 12 000 mots environ, dont 2 000 marques! Cela signifie que les marques sont mémorisées mais que, pour exister, elles doivent se distinguer de leurs concurrentes.»


Le risque d'aller trop loin dans la créativité semble mince si on prend soin de tester le nom. Ce garde-fou est une étape indispensable dans le processus de création. Mais le tester auprès de qui? Il faut solliciter le plus de monde possible: la famille et l'entourage, mais également les relations professionnelles, les confrères et même les clients potentiels. L'objectif est d'obtenir un maximum de réactions et d'avis sur le futur patronyme.

Le test permet également de vérifier si on a commis une bévue, notamment lorsque le nom dérive d'une langue étrangère. Les exemples de gaffes sont nombreux: Alcatel signifie "assassin" en arabe, Sega, "se masturber", en italien, etc. D'autres erreurs peuvent être commises si on connaît mal la culture des pays dans lesquels on souhaite s'implanter. Une société américaine voulait lancer en France un biscuit Petit Grégory. La marque de jus de fruits croate Pipi envisageait elle aussi de commercialiser une boisson à l’orange dans l’Hexagone… Des projets rapidement abandonnés.

 

     

Tendance: le futur est à la géographie

L’époque des noms en "is" est révolue! Cette diphtongue sonne vieux jeu. Selon un expert, «les noms en "is" et en "x" étaient en vogue pendant les années 1980. Puis sont arrivés les noms en "oo", à la suite de Yahoo! Aujourd'hui, on se réapproprie des figures historiques. C'est le cas avec Thalès ou avec Vinci.» Et l'avenir? Première tendance: jouez le décalage, avec des noms évocateurs mais qui n'appartiennent pas à l'univers de référence, comme Orange ou Alice.

Ce décalage rend moins problématique la diversification d’activité. Seconde piste: cherchez dans le registre géographique, pour vous donner des racines. Penchez-vous sur le nom des cours d'eau ou des lieux-dits de votre région. Les meilleurs exemples? Tiscali (une petite île proche de la Sardaigne) et surtout Nokia. Le nom de cette rivière finlandaise est devenu l'une des marques préférées des consommateurs du monde entier. Mais il faut être vigilant car «les noms évoquant des lieux géographiques peuvent poser problème au moment du dépôt de marque», avertit Marcel Botton.

Le pouvoir des lettres

Comme le style vestimentaire du dirigeant, le nom d'une société respecte les codes en vigueur dans un secteur professionnel donné. Pourtant, chaque consonance évoque des idées qui peuvent troubler ou renforcer la perception de l'entreprise. En voici quelques-unes.
- Noms en «v»: ils ont une consonance de vie et de mouvement.
- Noms en «x»: ils comportent plus d'aspérité et de personnalité.
- Noms en «ke», «pe», «te» (phonèmes explosifs): ils sont dynamiques. «C'est pourquoi la marque Kitekat est plus vivante que Sheba», assure Nicolas Tralongo, le directeur d'Enekia .
- Noms en «me», «ne» (phonèmes nasaux): ils évoquent la douceur, l'intimité et l'émotion. Certaines lettres, enfin, sont plus féminines que d'autres: a, y, f, l, m. -



Vous pouvez vous aider d'un logiciel

Trouver un nom, quel casse-tête! Consciente des difficultés rencontrées par les entreprises, une jeune société, Enekia, a inventé un logiciel de création de noms de marque. En quelques clics, il est possible de rechercher à partir d'un mot ses synonymes, ses contraires ou encore des mots qui l'évoquent et ce, dans six langues (français, anglais, allemand, espagnol, portugais, latin). Puis, en combinant ces résultats avec d'autres notions, on les déforme, on y ajoute des préfixes ou des suffixes afin de créer en quelques secondes des mots nouveaux. «80 % des termes auxquels on pense sont déjà déposés», estime Nicolas Tralongo, directeur d'Enekia. Pour 10 000 euros, ce logiciel assure donc un gain de temps considérable.

La marque doit pouvoir être représentée de manière graphique

Pour enregistrer une marque, il faut qu'elle soit «susceptible de représentation graphique» (article L. 711-1 du Code de la propriété intellectuelle, CPI). Il peut s'agir d'un signe verbal, tel qu'un mot, un assemblage de mots, un pseudonyme, des lettres ou des chiffres. La marque peut reprendre le nom des créateurs, ce qui est très fréquent (Ikea, Leclerc, Citroën...) ou un lieu géographique (Moutarde de Meaux ou Mont-Blanc). La marque peut également faire référence à l'activité poursuivie, par exemple La Brioche dorée. Par ailleurs, elle peut aussi consister en un signe figuratif (logo, dessin, emblème, nuance de couleur...), comme le célèbre crocodile de Lacoste ou le lion de Peugeot. Il est également possible de choisir un signe sonore, par exemple une phrase musicale qui tient sur une portée musicale. Enfin, la marque peut être un signe complexe combinant plusieurs signes, y compris la forme du produit ou son conditionnement. C'est notamment le cas de la bouteille de Perrier.

> Bon à savoir: les termes étrangers peuvent être déposés comme marque sans obligation de traduction. Ainsi les marques Nike just do it ou United Colors of Benetton sont admises. Mais la loi Toubon de 1994 impose la traduction en langue française des messages en langue étrangère accompagnant la marque.

 

 

 

 

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